Dès l’instant où je lui ai plu
il a pensé m’aimer
déjà, il nous conjuguait à l’avenir

je serai celle qu’il avait espérée
celle qu’il attendait encore
dans ma voix il entendait les mélodies de ses espoirs
entre mes mots il lisait les espaces pour les remplir
d’illusions et de chimères qui le comblerait

confondue et présumée
j’étais le présage de sa terre promise
et déjà vouée à sa rédemption

immédiatement
il m’a empoignée pour me retenir
il a posé sur moi le poids de ses regrets
et m’a clouée sur le sol de ses instincts

transporté par son désir hurlant
il a cherché mon plaisir
s’est dévoué corps et âme
à faire de moi sa déesse
sa maîtresse

il a fouillé dans mon corps
que je m’anime à sa brûlure
et que son acharnement m’extirpe des cris
autorisant ainsi cette indomptable ardeur
qui à nouveau le consumait
comme des flammes sur sa peau

invoquée
je me suis soumise à ce désir inconvenant
conquise
j’ai délivré mon corps de son étau
sans condition
je l’ai laissé m’assaillir

ensevelie dans une boue tiède et douce
entre humiliation et délectation
je me suis égarée moi aussi
dans les méandres de mes désirs contraires

et juste à la lisière de la forêt impénétrable
qui cherchait à nous avaler de son ombre
je me suis arrêtée
et je me suis regardée

femme sauvage
femme aimante
femme integrale

limpide et silencieuse
je l’ai attiré contre moi
et je me suis donnée en offrande

que les cieux s’éclaircissent dans ses yeux
que les oiseaux noirs s’éloignent de son âme
qu’il fasse la paix
avec lui
avec moi
avec elles

ar

« Nous n’avons besoin de morale que faute d’amour »
A. Comte-Sponville